• Honte à nous, complices d'Erdogan ! Franz-Olivier Giesbert

     

    Dans le journal Le Point du 15 octobre, le journaliste franco-américain Franz-Olivier Giesbert signe un édito poignant :

    Honte à nous, complices d'Erdogan !

    [...]

    L'incendie du Reichstag est devenu une spécialité turque : l'État profite d'un attentat commis ou non avec la complicité de ses services secrets pour l'attribuer aussitôt à ses adversaires, qu'il peut alors réprimer sans pitié. Adolf Hitler avait ouvert la voie en 1933. Recep Tayyip Erdogan, le président turc, la suit sans vergogne.
    Le pouvoir turc a apparemment signé son crime en accusant tout de suite le PKK d'être à l'origine de l'attentat le plus meurtrier de l'histoire du pays, perpetré à Ankara samedi dernier. Que ce soit le mouvement kurde de résistance armée qui ait décidé de tuer des manifestants pacifiques et pro-kurdes est totalement invraisemblable. Mais Erdogan, père Ubu affairiste, rongé par ses obsessions comme par des poux, n'a jamais été à une carabistouille près.

    [...]

    Il y a quelque chose de comique à voir nos gouvernants, Fabius en tête, prendre des airs dégoûtés devant Poutine alors que nous avons, avec Erdogan, un homme de la même engeance, en plus fourbe, dans notre propre camp. Le 28 juillet, un communiqué hallucinant de l'OTAN apportait le soutien de ses pays membres au pouvoir turc pour son prétendu juste combat contre les rebelles kurdes. A croire que la menace de Daesh est d'une même nature que le danger que font peser les Kurdes sur la Turquie, où ils représentent entre 16% et 20% de la population.

    Fort de ce blanc-seing, le régime islamo-conservateur d’Erdogan en a profité pour s’attaquer aux positions des rebelles kurdes en Syrie ou dans le nord de l’Irak plutôt qu’à celles de ses frères sunnites de Daech, dont il est, depuis le début du conflit, l’allié objectif et sournois. Si nous ne disons rien, c’est qu’il a acheté notre silence : en échange de notre assentiment, il « fixe » au moins 2 millions de réfugiés qui ont fui les barbares de l’Etat islamique.

    Nous autres, Occidentaux, ne sommes pas seulement lâches, ridicules et pathétiques. Pris en otages par le pouvoir turc, nous atteignons aussi le comble de l’abjection en soutenant activement la politique génocidaire d’Erdogan, qui entend bien réserver aux Kurdes le traitement que ses sinistres prédécesseurs du parti des Jeunes-Turcs firent subir aux Arméniens en 1915 : l’éradication quasi totale.

    Pour commettre son crime contre l’humanité, Erdogan bénéficie du soutien sans faille du Prix Nobel de la paix Barack Obama, son « idiot utile » , et des pays membres de l’Otan. Sans parler de ses supplétifs que sont les hordes de Daech, devenues des as du meurtre de masse de Kurdes.

    Ce qu’on appelait depuis le XIIe siècle le Kurdistan est aujourd’hui partagé entre la Turquie, l’Iran, l’Irak et la Syrie, ou ce qu’il en reste. Un peuple d’à peu près 35 millions de personnes, avec sa propre langue et une forte identité culturelle qui transcende les religions, musulmane, chrétienne ou yézidie, cohabitant pour l’heure face aux deux ennemis communs : l’Etat islamique et le pouvoir turc.

    Ce peuple joue sa vie. Plus nous nous en lavons les mains, plus elles deviennent sales…

     
    Photo de Kurdistanews, l'actualité du Kurdistan.
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